On appelle médecine intégrative une pratique médicale qui associe la médecine officielle et les autres approches de soins, qu’elles soient alternatives ou traditionnelles.
Pour le moment c’est un vœu pieux ; malgré quelques approches le climat est plus à la guerre qu’au rapprochement. La période du Covid 19 a compliqué le dialogue, les médecines alternatives se sont retrouvées du côté des antivax, et pour les faire taire quelques actions d’éclat ont été organisées : déremboursement de l’homéopathie, impossibilité de prise de RDV sur Doctolib auprès de soignants pratiquant les médecines alternatives, campagne de calomnie contre une naturopathe bien connue l’accusant d’encourager des agressions sexuelles sur des enfants (il y a 500 ans on l’aurait accusé de sorcellerie, on est dans le même niveau de mauvaise foi), mise en examen d’un organisateur de stage de jeune, et d’un défenseur du crudivorisme très suivi sur les réseaux sociaux, le tout souvent orchestré par la Mivilude (mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires). Alors oui il y a sans doute un peu de ménage à faire parmi les pratiquants des médecines alternatives mais ces procès visent spécifiquement quelques têtes emblématiques pour atteindre l’ensemble du secteur.
Pourtant la médecine intégrative se développe, peu en France, mais ailleurs en Europe et aux Etats-Unis.
C’est une combinaison coordonnée et démontrée scientifiquement des traitements conventionnels et des médecines complémentaires, alternatives ou traditionnelles, parmi lesquelles l’acupuncture, la phytothérapie, l’homéopathie, la kinésithérapie, l’ostéopathie, la naturopathie, l’aromathérapie.
La médecine conventionnelle a fait d’énormes progrès au cours des dernières décennies. Elle permet de repousser de plus en plus les limites de l’âge et de la maladie. Mais paradoxalement en s’occupant de problématiques hautement spécialisées elle perd de vue le patient dans sa globalité et sa capacité d’autogestion de la maladie. Des pratiques souvent ancestrales permettent de réapprendre à s’écouter soi-même, à mettre en place des techniques qui font du sens et du bien.
La médecine intégrative prend en compte la biologie du patient comme dans la médecine conventionnelle mais aussi son contexte social, son parcours de vie, ses croyances, sa vision à lui de la santé et des projets thérapeutiques, enfin plus largement ses buts de vie, associant l’aspect motivationnel et spirituel.
La communication et le travail en équipe sont essentiels, au niveau de chaque patient, pour proposer les soins les plus adaptés, mais aussi pour laisser la porte ouverte à d’autres médecines complémentaires même si leur niveau de preuve scientifique reste à démontrer ;
à ce propos il faut noter que les classiques essais randomisés contrôlés sont difficiles à mettre en œuvre dans le champ des interventions non médicamenteuses.
Alors, où se pratique la médecine intégrative ? Les Etats-Unis en sont les pionniers avec de grands centres depuis le début des années 2000, associant formation et recherche. En Europe le premier pays par le nombre de centres est l’Allemagne, suivi de la Suisse avec de niveau universitaire quatre centres, un à Zurich orienté sur l’oncologie et l’antalgie, un à Lausanne, le CEMIC (Centre de Médecine Intégrative et Complémentaire), premier centre académique en médecine intégrative d’Europe francophone, deux autres à Berne et Bâle.
Et en France ? Au niveau universitaire existe le CUMIC (Collège Universitaire de Médecines Intégratives et Complémentaires), basé à Nantes, qui regroupe des professeurs d’université qui veulent promouvoir et enseigner la médecine intégrative ; leur ambition d’un programme d’enseignement national est inspirante mais c’est un large chantier qui mettra du temps pour aboutir.
Au-delà du secteur public on trouve des initiatives privées, comme l’institut Rafaël (1)à Levallois-Perret. Pour cet institut la santé ne consiste pas en une simple absence de maladie ; elle doit être définie par la vitalité et le bien-être global dans toutes ses dimensions, physique, émotionnelle, psychologique, sociale et environnementale. D’abord centré sur l’oncologie, l’institut Rafaël s’intéresse désormais à toutes les pathologies chroniques ainsi qu’à la prévention.
On trouve aussi le Centre Pluridisciplinaire de Santé Intégrative Ar Ruskenn (2) à Plouhinec (56), qui propose un grand choix de thérapies complémentaires.
Tous les centres de médecine intégrative ne sont pas répertoriés officiellement, plusieurs hôpitaux tentent cette double approche, notamment en oncologie. L’hôpital de Papeete, par exemple, fait intervenir des thérapeutes traditionnels qui vont améliorer le bien-être du patient, lui faire accepter plus facilement les thérapies conventionnelles pour un meilleur résultat global.
La médecine intégrative reste embryonnaire en France et pourtant cette approche représente à l’évidence un grand bénéfice pour les patients ; elle est plébiscitée par une large majorité de patients parce qu’elle réunit le meilleur des thérapies et pratiques médicales, en évitant la deshumanisation de la médecine conventionnelle et en proposant une prise en charge globale.